Spiritualité, Nouvel-Age - Eveil de conscience
Exprimer pleinement la colère

Le thème de la colère nous offre une occasion unique d'approfondir la CNV [expression de la colère met en effet en évidence plusieurs aspects de ce processus et fait clairement ressortir son originalité par rapport à d'autres formes de communication.

De mon point de vue, tuer les gens est un acte trop superficiel. En effet, tuer; battre, accabler ou blesser l'autre - que ce soit mentalement ou physiquement - n'exprime jamais que de façon très superficielle ce que nous ressentons lorsque nous sommes en colère. Si nous éprouvons une vraie colère, il nous faut un moyen bien plus efficace pour l'exprimer pleinement.

Cette prise de conscience soulage généralement les groupes avec lesquels je travaille. Confrontés au racisme et à la discrimination, ils veulent renforcer leur capacité à faire évoluer les choses. Les termes de Communication « Non Violente» ou «empathique» les mettent mal à l'aise, car on les a trop souvent exhortés à étouffer leur colère, à se calmer et à accepter le statu quo. Ils se méfient des approches qui considèrent leur colère comme un élément indésirable, devant être évacué. Or le processus que nous décrivons ici nous invite non pas à ignorer, réprimer ou ravaler notre colère, mais à l'exprimer pleinement.



Ne pas confondre la cause et le facteur déclenchant



Nous ne sommes jamais en colère à cause de ce que les autres disent ou font.



Pour exprimer pleinement notre colère en CNV, le premier pas est de dégager l'autre personne de toute responsabilité dans cette colère. Il faut tout d'abord reconnaître que l'autre ne porte en rien la responsabilité de nos émotions. Nous écartons toutes pensées du type : « Il ou elle m'a mis en colère en faisant ceci ou cela » - qui n'aboutissent qu'à exprimer superficiellement sa colère en critiquant ou en punissant l'autre. Comme nous l'avons vu, le comportement d'autrui peut certes faire naître en nous tel ou tel sentiment, mais en aucun cas il n'en est la cause.

Nous ne sommes jamais en colère à cause de ce que quelqu'un d'autre a fait. Nous pouvons voir que son comportement a déclenché notre colère, mais il est indispensable de bien distinguer entre la cause et le facteur déclenchant. J'aimerais illustrer cette distinction par un exemple tiré de mon expérience dans les prisons suédoises. J'avais été sollicité pour montrer aux prisonniers qui avaient eu des comportements violents comment exprimer pleinement leur colère au lieu de tuer, de frapper ou de violer. Lors d'un exercice, je leur demandai d'identifier ce qui avait déclenché leur colère. L’un d'eux, John, écrivit: « Il y a trois semaines, j'ai adressé une requête à la direction et on ne m'a toujours pas répondu ». Il décrivait clairement un facteur déclenchant, expliquant ce que d'autres avaient fait - ou, le cas échéant, n'avaient pas fait.

Je lui demandai alors de dire la cause de sa colère: - « Dans ce cas précis, vous étiez en colère parce que... quoi » ?

- « Je viens de vous le dire » ! s'exclama-t-il. « J'étais en colère parce qu'ils n'avaient pas répondu à ma requête » !

En confondant le facteur déclenchant et la cause, il s'était convaincu que c'était le comportement du directeur de la prison qui le mettait en colère. C'est là un réflexe facile à acquérir dans une culture qui recourt à la culpabilité pour faire obéir les gens. Ce type de culture s'attache à nous faire croire que nous pouvons susciter chez les autres certains sentiments.



La confusion entre cause et facteur déclenchant entretient la culpabilité,



Pour les gens qui emploient la culpabilité comme stratégie de manipulation, il est utile de maintenir la confusion entre facteur déclenchant et cause. Comme nous l'avons souligné, les enfants qui entendent: « Papa et maman sont très tristes quand tu as de mauvaises notes » sont amenés à croire que, par leur comportement, ils sont responsables de la douleur de leurs parents. On observe la même dynamique dans les couples : « Cela me déçoit beaucoup que tu ne sois pas là pour mon anniversaire. » Notre langue favorise le recours à cette stratégie de culpabilisation : « Tu m'énerves », « Tu me fais du mal en faisant ceci ou cela », « Je suis triste que tu aies fait cela ». Nous ne manquons pas de tournures pour nous convaincre que ce sont les actes des autres qui sont à l'origine de nos sentiments. Or, pour parvenir à exprimer pleinement notre colère, nous devons tout d'abord comprendre que les actes des autres ne sont jamais la cause de nos sentiments.



Ce sont nos pensées - de reproches et de jugement - qui déclenchent notre colère.



Quelle est donc la cause de la colère ? Nous avons vu au chapitre 5 que nous pouvions choisir de réagir de quatre façons face à un message ou à une attitude qui nous déplaît.

Chaque fois que nous nous mettons en colère, c'est parce que nous pensons que l'autre est en tort.

- Nous choisissons alors de nous prendre pour Dieu et de juger l'autre, de le blâmer ou de décider qu'il mérite punition pour sa faute. C'est à mon sens là que réside la cause de la colère. Même si nous n'en sommes pas conscients, c'est dans notre pensée que la colère prend sa source.

La troisième possibilité décrite au chapitre 5 consiste à porter notre attention sur nos sentiments et sur nos besoins.

Au lieu d'analyser mentalement les torts de l'autre, nous choisissons de renouer avec ce qu'il y a de plus vivant en nous. Cette énergie vitale est particulièrement palpable et accessible lorsque nous restons à tout instant en contact avec nos besoins.

Supposons par exemple que quelqu'un arrive en retard à un rendez-vous. Si nous avons besoin d'être rassurés sur le fait que nous comptons pour cette personne, il se peut que nous nous sentions blessés. Si nous avons besoin de faire un meilleur usage de notre temps, nous éprouverons peut-être un sentiment de frustration. Si en revanche nous avions justement envie d'une demi-heure de solitude et de calme, nous serons plutôt reconnaissants au retardataire; nous ne nourrirons alors à son égard aucune colère. Ce n'est donc pas le comportement d'autrui, mais bien notre propre besoin qui suscite notre sentiment.

Lorsque nous sommes conscients de nos besoins - être rassurés, faire un meilleur usage de notre temps, ou être seuls -. nous sommes reliés à notre énergie vitale. Il se peut que nous éprouvions des sentiments intenses mais nous ne serons jamais en colère.

La colère provient d'une façon de penser qui ne tient pas compte des besoins et qui est donc coupée de la vie.

Elle indique que nous avons fait appel à notre intellect pour analyser et juger l'autre au lieu de nous focaliser sur nos besoins insatisfaits.

Une autre option consiste à porter notre attention sur les sentiments et besoins de l'autre. Dans ce cas, nous ne ressentons jamais de colère. Nous ne la réprimons pas, mais nous constatons simplement que toute colère est absente dès lors que nous sommes entièrement présents aux sentiments et aux besoins de l'autre.



Toute colère a une fonction vitale



Lorsque nous jugeons l'autre,

nous contribuons à la violence.





Utiliser la colère pour alerter notre attention.



La colère accapare notre énergie et la détourne vers des actions punitives.



Mais, me direz-vous, n'y a-t-il aucune circonstance qui justifie la colère ? N'est-on pas en droit d'éprouver une « indignation légitime » face, par exemple, à la pollution inconsidérée de l'environnement ? À cela, ma réponse est la suivante :

je suis profondément convaincu que, dans la mesure où je me permets de croire qu'il existe des actes « inconsidérés » ou « réfléchis », des gens « profiteurs » ou des gens « honnêtes », je contribue à la violence sur cette planète. Au lieu de discuter des termes à employer pour qualifier les gens qui tuent, violent ou polluent, je crois que nous sommes plus du côté de la vie en concentrant notre attention sur nos propres besoins.

Toute colère est à mon sens le fruit d'une pensée coupée de la vie, qui engendre la violence.

Au coeur de toute colère, il y a un besoin insatisfait. La colère peut donc être très utile si nous l'utilisons comme un signal d'alarme : elle nous permet de prendre conscience qu'il y a chez nous un besoin insatisfait et que nos pensées actuelles diminuent fortement nos chances de le satisfaire. Exprimer complètement notre colère requiert la capacité d'être pleinement conscients de nos besoins. Par ailleurs, pour satisfaire ces besoins, il faut de l'énergie. Or, la colère accapare notre énergie en l'utilisant pour punir l'autre. Au lieu de céder à l'« indignation légitime », mieux vaut donc considérer avec empathie nos propres besoins ou ceux des autres. Cela ne se fait certes pas du jour au lendemain, mais on y parvient à force de remplacer systématiquement l'expression « Je suis en colère parce qu'ils... » par :

« Je suis en colère parce que j'ai besoin de... »



J'ai tiré un enseignement mémorable à cet égard en travaillant dans un foyer de réinsertion pour enfants dans le Wisconsin. Il m'arriva deux jours de suite le même incident : je reçus un coup sur le nez. La première fois, je pris un coup de coude en essayant de séparer deux élèves. J'étais si furieux que je dus me retenir pour ne pas riposter ! Dans les rues de Detroit, où j'ai grandi, il en fallait bien moins pour me mettre en rage. Le deuxième jour, dans la même situation, je repris un autre coup - au même endroit, ce qui fut donc plus douloureux encore. Pourtant, je n'éprouvai aucune colère.

Ce soir-là, en repensant sérieusement à cet incident, je me rendis compte que j'avais intérieurement donné au premier petit garçon l'étiquette de « sale gosse ». J'avais déjà cette image de lui à l'esprit avant même que son coude ne m'atteigne. Au moment du choc, je n'avais pas simplement ressenti le coup de coude, mais je m'étais dit : « Ce sale gosse se croit tout permis ! » Je considérais en revanche le second enfant comme un « pauvre gamin paumé ». Et comme j'avais tendance à m'inquiéter pour lui, je ne ressentis aucune rage malgré mon nez qui saignait et me faisait encore plus mal que la veille. Cette expérience m'a vraiment aidé à comprendre que ce ne sont pas les actes d'autrui, mais l'image et les interprétations que nous avons à l'esprit, qui provoquent notre colère.





Facteur déclenchant et cause : lorsque nous les confondons



Je tiens à souligner la distinction entre facteur déclenchant et cause pour des raisons tant pratiques et stratégiques que philosophiques. Pour illustrer ce point, je reviens à mon dialogue avec John, le prisonnier suédois.



Lorsque nous prenons conscience de nos besoins, la colère cède la place à des sentiments qui servent la vie.



JOHN : il y a trois semaines, j'ai adressé une requête aux directeurs et ils ne m'ont toujours pas répondu.

MBR : Dans ce cas précis, vous étiez en colère parce que... quoi ?

JOHN : Je viens de vous le dire ! Parce qu'ils n'avaient pas répondu à ma requête !

MBR : Attendez... Au lieu de dire « J'étais en colère parce qu'ils » réfléchissez et prenez conscience de ce que vous pensez qui vous met tellement en colère.

JOHN : Je ne pense rien du tout.

MBR : Stop, doucement, écoutez simplement ce qui se passe en vous.

JOHN (après un moment de réflexion) : « Je me dis qu'ils n'ont aucun respect pour les êtres humains. Ce sont des bureaucrates froids et anonymes qui se fichent bien de tout le monde et ne pensent qu'à eux ! C'est une bande de »...

MBR : « Très bien, cela suffit. Maintenant, vous savez pourquoi vous êtes en colère : ce sont vos pensées qui vous irritent ».

JOHN : « Je ne vois pas ce qu'il y a de mal à penser de la sorte » !

MBR : « Je ne dis pas que c'est mal. Notez que, si je le disais, je penserais de la même manière que vous ! (jugement).

Je ne dis pas que c'est mal de juger les autres, de les traiter de bureaucrates anonymes, ou de qualifier leurs actes d'inconsidérés ou d'égoïstes. Mais c'est ce type de raisonnement qui nourrit la colère en vous. Concentrez-vous sur vos besoins : de quoi avez-vous besoin dans cette situation ?

JOHN (après un long silence) : « Marshall, j'ai besoin de la formation que j'ai demandée. Si je ne l'obtiens pas, je suis sûr et certain qu'à peine sorti de prison je me referai coffrer » !

MBR : « Maintenant que vous êtes concentré sur vos besoins, comment vous sentez-vous » ?

JOHN : « Terrifié » !

MBR : « Maintenant, mettez-vous dans la peau d'un directeur de prison et supposez que ce soit moi le détenu. D'après vous, aurais-je plus de chances d'obtenir ce que je veux en vous disant : j'ai vraiment besoin de ce stage et j'ai peur de ce qui pourrait arriver si je ne l'ai pas ou bien en m'adressant à vous, en vous considérant comme un bureaucrate anonyme ? Même si je ne prononce pas ces mots, mon regard trahira ce que je pense. Alors, comment ai-je plus de chances d'obtenir ce que je veux » ?

Le regard rivé au sol, John ne répond pas.

MBR : « Eh bien, que vous arrive-t-il » ?

JOHN : « Je ne peux pas en parler » :



La violence naît de la croyance que d'autres sont la cause de notre douleur et méritent par conséquent d'être punis.



Lorsque nous entendons un message difficile, souvenons-nous des quatre choix possibles :



1. nous sentir fautif;

2. rejeter la faute sur l'autre;

3. chercher à percevoir nos sentiments et nos besoins;

4. chercher à percevoir les sentiments et les besoins de l'autre.


Trois heures plus tard, John vint me trouver et me confia :

- « Marshall, si j'avais su, il y a deux ans, ce que vous venez de m'apprendre, je n'aurais pas tué mon meilleur ami ».



Toute violence vient de ce que, comme ce jeune détenu, les gens se laissent aller à penser que leur douleur est suscitée par d'autres personnes, et que ces autres personnes méritent d'être punies.



J'ai vu un jour mon plus jeune fils prendre une pièce de 2 francs dans la chambre de sa soeur.

- « Brett, as-tu demandé à ta soeur l'autorisation de prendre cet argent ? » lui ai-je demandé. - « Ce n'est pas à elle que je l'ai pris », répondit-il. Je pouvais réagir de quatre façons. J'aurais pu le traiter de menteur, ce qui serait allé à l'encontre de mes besoins, car juger l'autre limite nos chances d'obtenir ce que nous voulons. Ce sur quoi j'allais porter mon attention à cet instant serait déterminant. En le traitant de menteur, j'irais dans une direction bien définie. En voyant dans sa réponse le signe qu'il ne me respectait pas assez pour me dire la vérité, je prendrais une autre direction. Si en revanche je réussissais soit à lui manifester de l'empathie à ce moment précis, soit à exprimer ouvertement mes sentiments et besoins, j'aurais bien plus de chances de voir mes besoins satisfaits.



Juger les autres débouche sur des prophéties qui se réalisent d'elles.mêmes.



La façon dont j'exprimai mon choix - qui, dans ce cas précis, se révéla utile - ne transparut pas tant dans ce que je dis que dans ce que je fis. Au lieu de le traiter de menteur, je tentai d'entendre son sentiment: il avait peur et avait besoin de se protéger d'une punition. En adoptant une attitude empathique, j'avais l'occasion d'établir un contact affectif susceptible de nous satisfaire tous les deux. Cependant, si je l'avais considéré comme un menteur, même sans le dire, il se serait certainement senti moins en sécurité pour dire sincèrement ce qui s'était passé. J'aurais alors enclenché l'engrenage infernal : par le simple fait de le juger en le qualifiant de menteur, j'aurais alimenté une prophétie qui se serait réalisée d'elle-même. En effet, à quoi bon dire la vérité si l'on sait qu'elle nous vaudra d'être jugés et punis ?



Lorsque nous avons à l'esprit des jugements qualifiant les autres de mauvais, cupides, irresponsables, menteurs, tricheurs, pollueurs, intéressés, ou leur reprochant de ne pas se conduire comme nous le voudrions, rares seront ceux qui s'intéresseront à nos besoins.



Si nous avons l'âme écologiste et que nous abordons un patron d'usine en lui reprochant de détruire ]a planète et en affirmant qu'i! n'a aucun droit de traiter la Terre comme il le fait, nous limitons sérieusement nos chances d'obtenir ce que nous voulons. Seul un être exceptionnel serait en mesure de rester centré sur nos besoins en nous entendant lui adresser de tels reproches. Il arrive bien entendu que, par ces jugements, nous parvenions à intimider les autres pour les contraindre à satisfaire nos besoins. S'ils éprouvent suffisamment de crainte, de culpabilité ou de honte pour modifier leur conduite, nous pouvons finir par penser qu'il est possible de « convertir» les autres en leur exposant leurs défauts.

À terme, pourtant, nous comprenons que, à chaque fois que nos besoins sont satisfaits de cette manière, non seulement nous perdons, mais nous contribuons très concrètement à la violence sur Terre. Nous avons peut-être résolu notre problème à court terme, mais nous en avons aussi engendré un autre.



Plus les gens entendent des critiques et des jugements, plus ils se mettent sur la défensive et deviennent agressifs, et moins ils se soucieront à l'avenir de nos besoins.



Ainsi, même si notre besoin immédiat est satisfait, en ceci que les autres font ce que nous voulons, nous en paierons plus tard les conséquences.



Exprimer la colère en quatre temps



Les étapes de l'expression de la colère :



1. s'arrêter, respirer ;

2 identifier les jugements qui occupent nos pensées ;

3. retrouver le contact avec nos besoins ;

4. exprimer nos sentiments et nos besoins insatisfaits.



Voyons maintenant concrètement le processus qui nous permet d'exprimer pleinement notre colère.

- Nous marquons tout d'abord un temps pour respirer profondément.

- Nous nous abstenons de toute initiative visant à critiquer ou à punir l'autre. Nous restons simplement tranquilles.

- Puis, nous recherchons les pensées qui nous ont mis en colère.



Supposons par exemple que nous ayons surpris une réflexion qui nous a poussés à croire que nous avons été exclus d'une conversation à cause de la couleur de notre peau. Nous sentons monter la colère, marquons une pause et identifions ce qui nous vient à l'esprit: « Ce n'est pas juste. Elle a un comportement raciste. »

Mais, sachant que ce type de jugement est l'expression tragique de besoins insatisfaits, nous passons à l'étape suivante et cherchons à identifier les besoins sous-jacents à ces pensées. Si je qualifie quelqu'un de raciste, je peux éprouver le besoin d'être intégré, d'être considéré d'égal à égal, d'être respecté ou de me sentir plus proche de l'autre.

C'est seulement une fois notre colère traduite en termes de besoins et de sentiments que nous ouvrons la bouche pour exprimer ce qui est au fond de nous. Il faut néanmoins parfois s'armer d'une bonne dose de courage pour énoncer ces sentiments. Il me serait facile de m'emballer et de traiter mes interlocuteurs de « bande de racistes ». Je pourrais éprouver du plaisir à le faire, tandis que je peux avoir peur de reconnaître les sentiments et besoins profonds que recouvre mon jugement. J'exprimerais pleinement ma colère en disant à mon interlocuteur : « Lorsque vous êtes entré dans la pièce et que vous avez commencé à parler aux autres mais pas à moi, puis que vous avez fait ce commentaire sur les Blancs, je me suis senti vraiment mal et j'ai eu peur. Cela a réveillé en moi le besoin d'être traité d'égal à égal. Voudriez-vous me dire ce que vous ressentez quand je vous dis cela ? »


Offrir d'abord de l'empathie



Mieux nous écoutons les autres, mieux ils nous écouteront.



Dans la plupart des cas, avant d'espérer que l'autre parvienne à s'intéresser à ce que nous éprouvons, il faut passer par une autre phase. En effet, dans ce genre de situation, il est généralement difficile à notre interlocuteur de recevoir nos sentiments et besoins ; si nous voulons qu'il nous écoute, nous avons intérêt à lui témoigner d'abord de l'empathie. Plus nous agirons ainsi, plus il y aura de chances qu'il en fasse autant pour nous par la suite.



Depuis trente ans, j'ai eu de nombreuses occasions d'utiliser la CNV avec des personnes qui avaient des convictions bien ancrées sur les races et les groupes ethniques. Je me souviens notamment d'avoir pris un jour aux aurores un taxi, de l'aéroport au centre-ville. En route, le chauffeur reçut le message suivant: « Allez chercher M. Fishman à la synagogue de Main Street ». Le passager qui était assis à côté de moi grommela: « Ces sales youpins se lèvent dès l'aube pour mieux extorquer de l'argent à tout le monde. »

Je fulminais, l'espace de quelques secondes. Quelques années auparavant, ma première réaction aurait été de vouloir me jeter sur un tel individu pour lui taper dessus. Je respirai profondément et réagis avec empathie à la douleur, la crainte et la rage qui m'agitaient - ce qui est ma façon de prendre soin de moi.

Je gardai à l'esprit que ma colère ne provenait ni de mon compagnon de route ni de sa réflexion. Celle-ci avait réveillé le volcan qui était en moi, mais je savais que ma colère avait une origine bien plus profonde que les paroles qu'il venait de prononcer. je me détendis un moment et donnai libre cours à mes pensées violentes. Je pris même plaisir à l'image qui me vint de lui attraper la tête et de l'écraser l



Quand j'eus fini de m'occuper de moi, je fus en mesure de porter mon attention sur l'humanité qui se cachait derrière les paroles de mon interlocuteur, et la première chose que je lui demandai fut: « Comment vous sentez vous... ? » Je m'efforçai de lui témoigner de l'empathie, d'entendre sa douleur. Pourquoi ? Parce que je voulais voir le beau côté de la personne, et je tenais à ce qu'il prenne toute la mesure de ce que j'avais ressenti au moment où il avait fait cette réflexion. Je savais que je ne recevrais pas une telle compréhension s'il ressentait un tumulte intérieur. Mon intention était d'établir un contact avec lui et de considérer avec empathie et respect l'énergie vitale qui avait suscité chez lui ce commentaire. Je savais par expérience que si j'étais capable d'empathie, alors il serait capable de m'entendre. Ce ne serait pas facile, mais il le pourrait.



Rester conscients des pensées violentes qui nous viennent à l'esprit, sans les juger.



- VOUS sentez-vous contrarié ? demandai-je. On dirait que vous avez vécu de mauvaises expériences avec les juifs.

Il me regarda un instant, puis répliqua:

- Oui, ces gens-là sont répugnants ! Ils feraient n'importe quoi pour de l'argent !

- Vous êtes méfiant et vous avez besoin de vous protéger lorsque vous traitez en affaires avec eux ?

- Exactement ! s'exclama-t-il !

Puis il continua à émettre d'autres jugements, tandis que j'écoutais en silence les sentiments et besoins qu'ils recouvraient.



Lorsque nous entendons les sentiments et les besoins de l'autre, nous renouons avec l'humanité qui nous est commune.



Lorsque nous fixons notre attention sur les sentiments et besoins de l'autre, nous renouons avec l'humanité qui nous est commune. Quand j'entends les peurs de cet homme et le besoin qu'il a de se protéger, je reconnais que j'ai aussi besoin de me protéger et que je sais ce qu'est la peur.

Lorsque je place mon attention sur les sentiments et besoins d'un autre être humain, l'universalité de notre expérience m'apparaît. Dans l'exemple qui nous occupe, j’étais extrêmement contrarié par les pensées qui animaient mon interlocuteur, mais j'ai appris que j'apprécie davantage mes semblables si je n'entends pas ce qu'ils pensent. Et face à ceux qui entretiennent ce genre de pensées, j'ai appris à savourer bien plus la vie en me limitant à entendre ce qui est dans leur coeur, sans me laisser prendre au piège de ce qui est dans leur tête.

Mon voisin continua à épancher sa tristesse et sa frustration. À peine en avait-il fini avec les juifs qu'il passa aux Noirs. Tout un éventail de sujets lui inspirait de la souffrance. Je l'écoutai pendant une dizaine de minutes, puis il s'arrêta. Il s'était senti compris.

Ce dont nous avons besoin, c'est que l'autre entende vraiment notre souffrance.

Les gens n'entendent pas notre douleur lorsqu'ils croient avoir été pris en faute.

je lui fis alors part de ce que je ressentais :

- « Vous savez, lorsque vous avez commencé à parler, j'ai éprouvé beaucoup de colère et de frustration, et je me sentais triste et découragé parce que j'ai vécu des expé­riences très différentes des vôtres avec les juifs et j'étais en train de vous souhaiter d'avoir beaucoup plus d'expé­riences semblables aux miennes. Pouvez-vous me répéter ce que vous m'avez entendu dire » ?

- « Oh, je ne dis pas qu'ils sont tous »...

- « Non, non, attendez. Pouvez-vous me répéter ce que vous m'avez entendu dire » ?

- « Qu'est-ce que vous racontez » ?

- « Permettez-moi de répéter ce que j'essaie de vous dire. En fait, j'aimerais simplement que vous entendiez la souffrance que j'ai ressentie en entendant vos paroles. C'est très important pour moi que vous entendiez cela. Je disais que j'éprouvais une grande tristesse, parce que j'avais vécu des expériences très différentes des vôtres avec les juifs. ]'aurais simplement aimé que vous ayez connu d'autres expériences que celles que vous décriviez. Pouvez-­vous me dire ce que vous m'avez entendu dire » ?

- « Vous me dites que je n'ai pas le droit de parler comme je l'ai fait ».

- « Non, je voudrais que vous m'entendiez différem­ment. Je ne veux absolument pas vous reprocher quoi que ce soit. Je n'ai aucun désir de vous critiquer ».

je décidai de ralentir la conversation, car l'expérience m'a montré que si les autres entendent la moindre cri­tique, c'est qu'ils n'ont pas entendu notre douleur. Si cet homme avait dit : « je n'aurais pas dû parler de la sorte, ces réflexions étaient racistes », il n'aurait pas entendu ma douleur. À partir du moment où notre interlocuteur pense qu'il a fait quelque chose de mal, il ne prend pas toute la mesure de notre douleur.

Je voulais non pas qu'il entende un reproche, mais qu'il sache ce que ses paroles avaient éveillé en moi.

Il est facile d'accuser les autres de ceci ou de cela. Les gens sont habitués à entendre des critiques ; soit ils les acceptent et s'en veulent, soit ils se braquent et nous en veulent de les avoir traités de racistes, par exemple - ce qui, dans un cas comme dans l'autre, ne les empêche pas de persister dans leurs comportements.

Si nous croyons deviner qu'ils entendent une critique, il peut être souhai­table de ralentir, d'en revenir à la phase précédente et de se donner un peu plus de temps pour entendre leur souf­france.



Prendre son temps

Pour bien intégrer ce processus, l'essentiel est sans doute de prendre son temps. Nous pouvons éprouver une grande difficulté à rompre avec les comportements que notre conditionnement a rendus automatiques, mais si notre intention est de vivre en harmonie avec nos valeurs, nous aurons alors à coeur de nous accorder du temps.

Un de mes amis, Sam Williams, avait résumé les élé­ments essentiels de la CNV sur une petite fiche, qu'il avait toujours sur lui au travail. Au moindre conflit avec son patron, il marquait une pause, sortait son « antisèche » et révisait soigneusement la marche à suivre pour réagir. Je lui demandai si ses collègues ne le trouvaient pas un peu bizarre en le voyant constamment consulter sa petite fiche et prendre un temps infini à préparer ses phrases.

- « En fait, cela ne dure pas si longtemps que cela », répondit Sam. « Et quand bien même, cela en vaudrait la peine. C'est important pour moi de savoir que je réponds aux autres comme je le veux vraiment ».

En famille, il agissait plus ouvertement et avait expliqué à sa femme et à ses enfants pourquoi il prenait le temps et la peine de consulter sa petite fiche, par exemple lorsqu'une dispute menaçait. Au bout d'un mois, il s'était senti assez sûr de lui pour laisser son antisèche de côté. Mais un soir, il eut maille à partir avec son fils de quatre ans, qui refusait d'éteindre la télé. Le conflit dégénéra, et le gamin le supplia: « Papa, va cher­cher ta fiche » !



S’entraîner à traduire chaque jugement en besoin insatisfait.

je propose un exercice à ceux qui souhaitent appliquer la CNV, notamment dans des situations délicates ou dans les moments de colère. Comme nous l'avons vu, notre colère provient des jugements, étiquettes et reproches por­tant sur ce que les autres « devraient » faire et sur ce qu'ils « méritent ».

Recensez les jugements qui vous viennent le plus souvent à l'esprit en commençant votre phrase par : « je n'aime pas les gens qui sont... »

À partir de cette liste de qualificatifs négatifs, demandez-vous : « Lorsque je juge quelqu'un, quels sont les besoins qui, chez moi, ne sont pas satisfaits ? »

Peu à peu, vous apprendrez ainsi à penser davantage en termes de besoins insatisfaits que de juge­ments.

Prendre notre temps.

La pratique est essentielle, car nous avons presque tous grandi sinon dans les rues de Detroit, du moins dans des milieux plus ou moins violents. Juger et critiquer sont devenus chez nous une seconde nature.

Pour pratiquer la CNV, il nous faut procéder lentement, réfléchir posément avant de parler, et souvent juste prendre une profonde res­piration et ne rien dire du tout. L’apprentissage de ce pro­cessus est long, tout comme sa mise en application. Mais le jeu en vaut vraiment la chandelle !!!

RÉSUMÉ

Critiquer et punir les autres sont autant d'expressions superficielles de la colère. Si nous souhaitons exprimer plei­nement la colère, le premier pas est de décharger l'autre de toute responsabilité, afin de porter notre entière attention sur nos propres sentiments et besoins. Nous avons bien plus de chances d'obtenir ce que nous souhaitons en exprimant nos besoins qu'en jugeant, critiquant ou punissant l'autre.

L’expression de la colère se fait en quatre temps :

1) mar­quer une pause et respirer profondément

2) identifier les jugements qui nous viennent à l'esprit

3) prendre conscience de nos besoins et

4) exprimer nos sentiments et nos besoins inassouvis.

Il se peut que, entre les étapes 2) et 3), nous choisissions de témoigner de l'empathie à l'autre pour lui permettre de mieux nous écouter lorsque nous expri­merons notre demande 4).

Il est nécessaire de prendre son temps pour apprendre le processus de la CNV, et aussi pour l'appliquer.


LA CNV en pratique

Dialogue entre un parent et un ado sur les conséquences de nos actes :

Alexandre, quinze ans, a emprunté une voiture sans l'autori­sation de son propriétaire, Georges, un ami de la famille. Il s'est offert une petite virée avec deux amis et a ramené la voiture sans encombre, et sans même que personne ne se soit aperçu qu'elle avait quitté le garage. Mais entre-temps, la fille de Georges, Sandrine, quatorze ans, qui avait participé à la petite balade, a tout raconté à son père. Georges a alors alerté le père d'Alexandre, qui, fraîchement initié à la CNV, décide de parler à son fils.

LE PÈRE : - « J'ai entendu dire qu'avec Sandrine et David tu avais pris la voiture de Georges sans lui demander la permission » ?

ALEXANDRE : - « Ce n'est pas vrai » !

LE PÈRE, haussant le ton : « Ne me mens pas, tu aggraves ton cas » !

(Il se souvient alors qu'il lui faut tout d'abord identifier ses propres sentiments et besoins pour ne pas perdre contact avec son fils).

LE PÈRE : – « Assieds-toi un moment, j'ai besoin de réfléchir ». Puis, plongeant en lui-même, il mesure sa colère et sa peur. Il est en colère parce qu'il se dit : « Alexandre aurait dû être plus raisonnable que cela !... Et en plus, il est devenu menteur ! » Il tremble en pensant non seulement aux conséquences qu'aurait pu avoir l'action d'Alexandre, mais aussi à sa propre erreur de jugement sur le comportement de son fils. « j'ai été idiot de penser qu'il était raisonnable !... Quelqu'un aurait pu se faire tuer dans cette histoire » ! Mais il se rattrape aussitôt : « Attention ! Je dois traduire les adjectifs « idiot » et « menteur » en termes de sentiments et de besoins. Je suppose que quand je me sens « idiot », je suis déçu par moi-même ; j'aurais aimé me dire que je le connaissais mieux. Et quand je le traite de « menteur », j'éprouve de la peur car je veux pouvoir compter sur des informations précises pour gérer la situation ». En silence, il prépare ce qu'il va dire).

LE PÈRE : - « Alexandre, as-tu peur d'être puni si tu me dis la vérité » ?

ALEXANDRE: « Bien sûr ! Tu me tombes toujours dessus quand je fais quelque chose qui ne te plaît pas ».

LE PÈRE : - « Es-tu en train de me dire que tu aimerais être mieux compris et traité avec plus d'objectivité pour ce que tu fais » ?

ALEXANDRE : - « C'est ça, essaie de me faire croire que c'est toi qui vas me comprendre et être objectif » !

LE PÈRE, (intérieurement : Je vois rouge quand il dit ça ! Il ne se rend donc pas compte des efforts insensés que je déploie ? En fait, j'ai besoin d'un peu de respect et de reconnaissance pour ces efforts, et aussi, je crois, que l'on prête attention à ma peur) ! : - « Il me semble que tu crains de ne pas être traité de façon impartiale, quoi que tu dises ».

ALEXANDRE : « Ce n'est pas l'impartialité qui t'étouffe ! Dès qu'il arrive quelque chose, tu veux à tout prix punir quelqu'un. D'ailleurs, il n'y a pas de quoi en faire un plat ! Même si j'ai pris la voiture, il n'y a pas eu de blessé et elle est revenue à sa place. Ce n'est tout de même pas un crime » !

LE PÈRE : « Crains-tu des représailles si tu reconnais avoir pris la voiture et voudrais-tu être certain d'être traité de façon impartiale » ?

ALEXANDRE : « Ben, oui »...

LE PÈRE prenant le temps, avant de répondre, de saisir en profondeur ce qui se passe en lui : - « Que pourrais-je faire pour te rassurer » ?

ALEXANDRE : - « Tu pourrais promettre de ne plus jamais me punir ».

LE PÈRE, sachant que la punition n'aidera pas son fils à mieux prendre conscience des éventuelles conséquences de ses actes mais ne servirait qu'à accentuer sa résistance et à l'éloigner est prêt à accéder à la demande d'Alexandre : - « Je n'aurais rien contre si tu étais d'accord pour continuer à dialoguer avec moi. J'aimerais que nous parlions jusqu'à ce que je sois persuadé que tu es conscient de toutes les conséquences que tu aurais pu déclencher en prenant la voiture. Cependant, si à l'avenir je ne suis pas certain que tu mesures le danger potentiel de tes actes, je me réserve la possibilité d'user de la force - mais seulement pour te protéger ».

ALEXANDRE : - « Super ! Ravi de savoir que je suis si bête que tu es obligé d'user de la force pour me protéger de moi­-même » !

LE PÈRE, perdant de vue ses propres besoins se dit : Il y a vraiment des moments où je pourrais tuer ce petit... Je suis tellement furieux quand il dit des choses comme ça ! Voyons, de quoi ai-je besoin, ici et mainte­nant ?... J'ai besoin de savoir que, quand je fais de tels efforts, ça lui fait au moins un peu d'effet...

À voix haute, d'un ton coléreux : - « Tu sais, Alex, quand tu dis ce genre de choses, ça me met vraiment en rogne. Je fais de mon mieux pour te comprendre, dans cette histoire, mais quand je t'entends dire ça... Écoute, j'ai besoin de savoir si tu as envie de continuer à parler avec moi ».

ALEXANDRE : - « Ça m'est égal ».

LE PÈRE : « Alex, j'ai vraiment envie de t'écouter au lieu de retomber dans mes vieilles habitudes de te critiquer et de te menacer dès que quelque chose me contra­rie. Mais quand je t'entends dire sur ce ton « Ravi de savoir que je suis si bête », j'ai beaucoup de mal à me maîtriser. J'aurais besoin de ton aide là-dessus. J'ai besoin de savoir si tu préfères que je t'écoute au lieu de te faire des reproches et de te menacer. Sinon, je suppose que je n'aurai d'autre choix que de régler cet incident comme avant ».

ALEXANDRE : - « C'est-à-dire » ?

LE PÈRE : - « Eh bien, là, je dirais probablement : tu es puni pour deux ans. Plus de télé, plus de voiture, plus d'argent de poche, plus de sorties, plus rien » !

ALEXANDRE : - « Dans ce cas, je crois que je préfère ta nouvelle façon de faire » !

LE PÈRE (avec humour) : « Je suis ravi de constater que tu »n'as rien perdu de ton instinct de conservation. Maintenant, j'ai besoin que tu me dises si tu es prêt à partager un peu d'honnêteté et de vulnérabilité ».

ALEXANDRE : - « Qu'est-ce que tu entends par « vulnérabilité » ?

LE PÈRE : - « Cela implique que tu me dises ce que tu ressens réellement et que je te dise ce que moi je ressens ». D'une voix ferme il ajoute : - « Alors, tu en as envie » ? ALEXANDRE : - « D'accord, je vais essayer ».

LE PÈRE, dans un soupir de soulagement : - « Merci. Je te suis reconnaissant de bien vouloir essayer. Est – ce que je t'ai dit que Georges avait puni Sandrine pour trois mois ? Elle n'aura plus le droit de sortir. Qu'est-ce que ça te fait » ?

ALEXANDRE : - « Oh, la barbe ! Ce n'est pas juste » !

LE PÈRE : - « J'aimerais entendre ce que cela te fait vraiment ».

ALEXANDRE : - « Je viens de te le dire : c'est complètement injuste » !

LE PÈRE, comprenant qu'Alexandre n'est pas conscient de ce qu'il ressent décide de deviner : - « Es-tu triste qu'elle doive payer si cher son erreur » ?

ALEXANDRE : - « Non, ce n'est pas ça. Ce n'était pas réellement sa faute ».

LE PÈRE : - « Tu es donc contrarié qu'elle paye les conséquences d'un acte dont tu étais à l'origine » ?

ALEXANDRE : - « Ben, oui... Elle a juste fait ce que je lui disais de faire ».

LE PÈRE : - « J'ai l'impression que ça te fait un peu mal de voir les conséquences que ta décision a entraînées pour Sandrine ».

ALEXANDRE : - « Un peu »...

LE PÈRE : - « Alex, j'ai vraiment besoin de savoir que tu com­prends en quoi tes actes peuvent porter à consé­quence ».

ALEXANDRE : - « Je n'avais pas pensé à ce qui aurait pu se passer. Oui, je crois que j'ai mal joué, là ».

LE PÈRE : - « Je préférerais que tu le voies comme quelque chose que tu as fait et qui n'a pas donné les résultats que tu attendais. Et j'ai toujours besoin d'être assuré que tu es conscient des conséquences. Veux-tu me dire ce que tu ressens en ce moment, face à ce que tu as fait » ?

ALEXANDRE : - « Je me sens vraiment idiot... Je t'assure, papa, je ne voulais faire de mal à personne ».

LE PÈRE, traduisant le jugement de son fils en sentiments et besoins : - « Tu es donc triste et tu regrettes ce que tu as fait parce que tu voudrais que l'on puisse te faire confiance » ?

ALEXANDRE : - « Oui, je ne voulais pas provoquer tous ces ennuis. Je n'y ai tout simplement pas pensé ».

LE PÈRE : - « Es-tu en train de me dire que tu aurais aimé y pen­ser un peu plus et avoir une idée plus précise avant d'agir » ?

ALEXANDRE, pensif : - « Oui »...

LE PÈRE : « Je suis rassuré d'entendre cela et, pour véritable­ment arranger les choses avec Georges, je voudrais que tu ailles le voir et que tu lui répètes ce que tu viens de me dire. Tu voudrais bien » ?

ALEXANDRE : - « Oh, c'est trop terrifiant! Il va être furieux ».

LE PÈRE : - « Il y a des chances, en effet. C'est l'une des consé­quences. Veux-tu être responsable de tes actes ? J'aime bien Georges et je ne veux pas perdre son amitié. Et je suppose que toi, tu aimerais rester en contact avec Sandrine. C'est bien ça » ?

ALEXANDRE : - « C'est l'une de mes meilleures amies ».

LE PÈRE : - « Alors, va les voir ».

ALEXANDRE, avec crainte et hésitation : - « Bon... d'accord »...

LE PÈRE : - « As-tu peur et as-tu besoin de savoir que tu ne risques rien en y allant » ?

ALEXANDRE : - « Oui ».

LE PÈRE : - « Eh bien, si tu veux, je t'accompagne. Je serai là pour toi et avec toi. Je suis très fier que tu acceptes d’y aller ».


Vous trouverez la liste de nos « BESOINS FONDAMENTAUX » essentielle pour entreprendre la pratique véritable de
la Communication Non Violente (CNV) dans l’ouvrage :

« LES MOTS SONT DES FENÊTRES OU BIEN CE SONT DES MURS »
Marshall B. Rosenberg
Ed. La Découverte

Le dernier ouvrage de Marshall Rosenberg :
« DÉNOUER LES CONFLITS PAR LA COMMUNICATION NON VIOLENTE »
Ed. Jouvence




Exprimer pleinement la colère (Spiritualité, Nouvel-Age - Eveil de conscience)    -    Auteur : armant - Maroc


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